Lacq en Béarn : Une alliance inattendue

"Lacq en Béarn", 7.70 x 2.42m, Élisabeth Baillon, 1969 (cliquez sur l'image pour l'agrandir) ©Sébastien Arnouts

 

Entre l'art et la pétrochimie, entre les cheminées d'usines et les Pyrénées

"Lacq en Béarn" est une immense broderie de 7 mètres de long, commandée en 1968 par Elf Aquitaine à l'artiste plasticienne Élisabeth Baillon. L'œuvre donne à voir une vue poétique du bassin de Lacq à l’aube des années 1970.

 

Sur l'œuvre, de gauche à droite, s’étendent dans un style naïf la vieille ville de Mourenx, animée par deux chasseurs à la palombe et un paysan sur sa charrue, puis les immeubles modernes de la ville nouvelle et enfin l’usine d’extraction de gaz, avec ses cheminées, ses réservoirs, ses bancs de soufre jaune vif, et ses tours de forage. Au premier plan, trois foreurs travaillent autour d’un trépan, tandis qu'en toile de fond, s’étale la chaîne des Pyrénées.

 

Achevée en 1969, cette broderie sur laine a été réalisée avec une machine à broder Cornely, que l'artiste a détourné de sa fonction industrielle pour créer une technique artistique bien à elle. 

 

Neuf mois de travail à six mains permettront de livrer cette première broderie, en 1969. Avant de créer la broderie définitive que nous connaissons aujourd'hui, Élisabeth Baillon réalisa une première maquette sur gouache, en 1968.

 

Par la suite, ce sont quatre autres broderies qui verront le jour, créant toute une série sur le Béarn, ses coutumes, sa chasse à la palombe, et son industrie nouvelle.

 

Élisabeth Baillon, une artiste pionnière et autodidacte

 

Après un court passage à l’école des métiers d’art, la jeune Élisabeth Baillon, née en 1941, découvre très vite qu’elle n’aime pas « être enseignée ».

 

Mère de trois enfants, féministe, elle occupe ensuite divers métiers pour répondre à ses aspirations d’indépendance. C’est grâce à l’un deux, représentante en tissus, qu’elle trouve son matériau de prédilection : la broderie.

 

 

 

 

 

 

 

 

Autodidacte, elle a détourné la machine à broder Cornely de sa fonction industrielle pour créer une technique artistique bien à elle, tout à fait à part des broderies traditionnelles. En lui confiant une machine à broder, son patron de l’époque lui permet de créer sa première petite tapisserie. Exposée à Paris dans une galerie d’art sacré tenue par des amis, l’oeuvre se vend tout de suite. De fil en aiguille, elle enchaîne les expositions et répond à de nombreuses commandes en art sacré ou pour des acheteurs publics.

 

Un procédé de création bien à elle

Son principe consiste à esquisser dans un premier temps ses dessins sur une toile solide. Puis, elle brode chaque trait en guidant à la main sa machine Cornely, en utilisant des laines très fines d'Aubusson, résistantes au passage du temps et à la lumière. Certaines de ses oeuvres dépassent les dix mètres de long !

 

Il y a soixante ans, le mot de broderie était difficile à porter, associé au féminin, au tricot… Elle faisait alors figure de pionnière.